Les actes de la conférence

Publié le 07 février 2025

Mener une vie sans regrets : est-ce possible ?

Nous vous proposons ci-dessous un petit résumé de la conférence que Christophe Massin a accepté de donner pour PalliaNam le 7 octobre 2024 autour de la thématique « Mener une vie sans regrets : est-ce possible? »

Si vous souhaitez aller plus loin, vous êtes cordialement invités à télécharger les actes complets de la conférence via le bouton ci-après.

Bonne lecture !


Introduction et cadre de la conférence

La soirée a été introduite par Caroline Coolen, directrice de PalliaNam, qui a remercié les participants et rappelé les objectifs de l’association : diffuser la culture des soins palliatifs, sensibiliser le grand public, et accompagner les patients en fin de vie. Elle a mis l’accent sur l’importance de réfléchir collectivement à des questions essentielles comme la qualité de vie et les regrets.

Christophe Massin, psychiatre, psychothérapeute et auteur, a été présenté par Emmanuelle Paternostre, psychologue chez PalliaNam. Elle a souligné son parcours atypique et son approche intégrant psychothérapie et spiritualité, inspirée de la philosophie orientale. Ses ouvrages, comme « Soigner sans s’épuiser* et* »Savoir se défendre, l’immunité psychique« , montrent son engagement à aider chacun à mieux vivre ses émotions.

Les regrets et la quête de sens : de quoi parle-t-on ?

Christophe Massin a débuté son intervention par une question interpellante : « Qui, ici, a le sentiment de mener réellement sa vie ? » Peu de mains se sont levées, soulignant une problématique commune. Il a alors exploré le concept de « mener » sa vie, qui implique de diriger consciemment ses choix et actions. Tout en mettant en lumière que  la plupart d’entre nous subissent les conditionnements familiaux, sociaux et culturels.

Ces conditionnements incluent :

– Les attentes implicites des familles : réussite professionnelle, mariage, enfants, etc.

– Les normes sociales variant selon les cultures ( par exemple, la perception des femmes travaillant après avoir eu des enfants en Allemagne versus en France).

 Le conférencier a rappelé que ces influences extérieures créent des désirs en nous qui ne sont pas forcément authentiques. En conséquence, beaucoup de personnes réalisent, souvent tardivement, qu’elles n’ont pas vécu selon leurs aspirations profondes.

Deux grandes catégories de regrets ont été identifiées :

1. Les regrets liés à la perte de quelque chose de positif : Par exemple, des souvenirs heureux ou des opportunités qui ne reviendront pas.

2. Les regrets d’erreurs (ou perçues comme telles) : « Si j’avais su, j’aurais… ». Ces regrets sont liés à des choix qui semblent rétrospectivement mal alignés avec nos véritables aspirations.

Dans les deux cas, les regrets, s’ils ne sont pas acceptés ou dépassés, pèsent lourdement sur la qualité de vie. Ils peuvent aussi resurgir avec force en fin de vie, comme le constatent les professionnels des soins palliatifs.

Des clés pour vivre sans regrets

Christophe Massin a souligné que l’un des obstacles majeurs à une vie sans regrets réside dans notre nature plurielle. En chacun de nous coexistent différents « personnages » : l’ambitieux, le parent, le rêveur, etc. Ces facettes poursuivent souvent des objectifs divergents, ce qui crée des tensions internes.

Il a comparé cette situation à une république instable où divers dirigeants se succèdent sans coordination. Pour éviter cette « révolution intérieure », il est crucial de :

– Identifier ces personnages qui se côtoient à l’intérieur de nous.

– Favoriser un dialogue intérieur.

– Développer un « centre unifié » capable d’écouter ces différentes voix tout en maintenant un cap clair.

Un autre pilier pour vivre sans regrets est le discernement entre :

Les désirs authentiques, qui proviennent de nos besoins profonds.

Les désirs empruntés, dictés par les attentes sociales ou les influences extérieures.

L’indicateur d’un désir authentique est la joie durable qu’il procure, même face à des obstacles. En revanche, les désirs superficiels apportent souvent une satisfaction éphémère, suivie d’un sentiment de vide.

Il ne suffit pas de réaliser ses objectifs pour éviter les regrets. Ce qui compte, c’est comment ces expériences sont vécues. Le conférencier a insisté sur l’importance de savourer pleinement chaque étape du cheminement, sans précipitation.

Il a utilisé l’analogie du vin : tout comme on prend le temps d’observer sa robe, de sentir ses arômes et de le déguster lentement, il faut vivre les expériences avec présence et conscience.

4. La gestion des pertes et des douleurs

Dans une perspective inspirée de la spiritualité orientale, Christophe Massin a expliqué que la perte est une composante naturelle du cycle de vie. Chaque phase de notre existence implique l’apparition, le maintien, puis la disparition de certaines formes (relations, capacités, etc.). Refuser ce cycle crée une souffrance inutile.

Le conférencier a rappelé l’importance de vivre pleinement le processus de deuil, qu’il s’agisse d’une perte matérielle, relationnelle ou existentielle. Il a dénoncé la tendance actuelle à fuir ou réprimer ces émotions, ce qui empêche leur résolution.

Vivre ses émotions de perte est essentiel pour retrouver la paix intérieure. Cela inclut :

– Reconnaître la douleur sans chercher à l’éviter.

– Accueillir et exprimer ses émotions (colère, tristesse, etc.).

– Trouver du sens dans la perte, par exemple en identifiant les leçons qu’elle apporte.

Un des points marquants de la conférence a été la distinction entre l’amour et l’attachement. Ce dernier, source de souffrance, est lié à notre dépendance émotionnelle envers l’autre. En revanche, l’amour véritable persiste même en l’absence de la personne aimée.

Trois verbes fondamentaux : recevoir, faire, donner

Christophe Massin a structuré sa réflexion autour de ces trois verbes, qui résument les étapes principales de la vie :

  • Recevoir : Cela commence dès l’enfance, mais reste essentiel tout au long de la vie. Recevoir demande une réceptivité consciente, notamment dans les moments de contemplation.
  • Faire : Agir en alignement avec ses valeurs, sans précipitation, est une clé pour éviter les regrets.
  • Donner : Avec l’âge, la transmission et le partage deviennent des sources majeures de satisfaction. Il a souligné l’importance pour les personnes âgées de trouver des moyens de continuer à contribuer au monde.

Questions-réponses : approfondissements et applications pratiques

Lors des échanges avec le public, plusieurs thématiques ont été explorées :

L’accompagnement des adolescents : Aider les jeunes à discerner leurs désirs authentiques passe par le questionnement et l’écoute active, plutôt que par des réponses imposées par les adultes.

Le rôle des antidépresseurs : Christophe Massin a reconnu leur utilité, tout en appelant à une évaluation prudente des besoins réels de chaque patient.

La gestion de la douleur psychologique : Il a insisté sur l’importance d’accepter la douleur comme une expérience humaine normale, tout en respectant les limites de tolérance de chacun.

Le contemplatif : Cette aptitude à recevoir et à se laisser toucher par la beauté est essentielle pour équilibrer une vie souvent dominée par le faire.

Conclusion : Une pratique quotidienne

Christophe Massin a conclu en rappelant que vivre sans regrets est un processus continu, nécessitant de l’attention, de la persévérance, et un engagement à mieux se connaître. Il a encouragé chacun à se poser quotidiennement cette question : « Suis-je satisfait de ma journée ? Qu’est-ce qui m’a apporté de la joie ou du sens aujourd’hui ? »

Il a également souligné que ce cheminement demande des efforts, mais qu’il offre une récompense inestimable : une vie alignée, consciente, et apaisée.